jeudi 10 mars 2011

Adventures in Solitude.

Avant de commencer, voici un lien qui va vous guider à la chanson qui m'a inspiré le titre de l'article: http://www.youtube.com/watch?v=zq5ITDL3oQ0. Déjà, quand on écoute une telle merveille, l'inspiration vient plus naturellement. Les mots courent sur le clavier et je n'ai aucun droit dessus. Les arrêter serait trahir ce que je ressens. Je l'ai trop fait.
Cette deuxième partie de mon récit sera plus centrée sur les sentiments intérieurs que sur les faits que je vous ai d'ailleurs déjà exposés dans un article précédent.
Après avoir passé au Chili quelques jours de bonheur partagé et intense, je suis partie seule et j'ai voulu me prouver que je pouvais réussir ce défi. Celui de voyager seule, de découvrir la beauté du monde en tête à tête avec le silence. Il est vrai que, comme je ne cesse de le répéter, ma plus grande frustration est de ne pas pouvoir partager ce que je vis ici, cette année à Buenos Aires. Cependant, ces 10 jours en solitaire m'ont montré qu'il existait, au moins en ce qui concerne les "trips", une autre façon de concevoir des vacances. Le fait d'être seule m'a permis de visiter tout ce dont j'avais envie à mon rythme.
Toute la troupe à Valparaiso

A Mendoza, ça a été dur car je venais de sortir des moments d'euphorie chiliens et tout était encore trop frais dans ma tête pour faire la part des choses et profiter du voyage. J'étais très fatiguée et à bout de nerfs. J'ai eu beaucoup de mal à m'y faire, je pensais même rentrer directement à Buenos Aires car je n'arrivais à me motiver pour rien. Finalement, je me suis dit que c'était trop bête de rentrer après 2 jours et que je n'avais pas à céder si rapidement. Alors, j'ai continué mon périple jusqu'à San Juan. Cette ville m'a laissé une belle impression, car inconsciemment, elle m'a aussi poussé à continuer le voyage. Ces sourires, cette amabilité des gens m'a fait percevoir la richesse de cette expérience. San Juan a ce côté de village qui rend l'Argentine plus attachante et plus personnelle. Loin des foules et des cris, se promener dans San Juan est reposant. Cependant, elle reste très petite et la nuit même j'ai pris le bus pour Salta.

A l'auberge de jeunesse de Salta, j'ai rencontré 3 français: Lorène (27 ans, archéologue), Maeva (25 ans, études d'archéologie mais en doute sur la suite) et François (23 ans, études d'archéologie mais en doute sur la suite). Le courant est tout de suite passé et je les ai revus hier à Buenos Aires et c'était réellement un plaisir. Rien que pour cette jolie rencontre, ce voyage me laisse un bon souvenir. J'ai aussi rencontré deux danoises qui faisaient le tour de l'Amérique Latine, deux autres dames françaises très sympathiques et un états-unien gentil, un peu fou-fou et avec qui je me suis disputée une nuit à propos des révoltes dans le monde arabe. Pour faire simple, pour lui, ces "révolutions" allaient encore amplifier l'insécurité et provoquer un autre 11 septembre 2001. Autant vous dire que je suis partie au quart de tour et s'en est suivi une longue discussion...


Cabine du téléphérique de Salta

Salta est une ville colorée et animée. Mais pas suranimée comme l'est Jujuy selon moi. Au détour d'une rue, un parc peut apaiser l'ambiance de la rue piétonne commerçante. Les bâtiments sont sublimes et parfaitement entretenus ce qui procure une magie inoubliable. J'ai parcouru ces rues avec émerveillement. Je suis montée sur le Cerro San Bernardo (cf vidéo) pour avoir une vue panoramique de toute la ville, et malgré la brume, cela m'a beaucoup plu. J'ai l'impression qu'on se rend mieux compte des choses en les observant dans leur globalité. Salta, qui paraît petite, est très étalée vue d'en haut. J'ai également visité un musée où sont exposés de nombreux objets indiens anciens et récents. Cette visite m'a énormément plu car c'était un véritable voyage dans le temps. J'ai quand même regretté le guide, qui malgré sa sympathie, m'énervait à force de vouloir tout me traduire en français.


Eglise principale de Salta

Après Salta, je suis encore allée plus au nord, à Humahuaca. Cette ville semble hors du temps. Cette atemporalité m'a surprise et m'a effrayé. Le sol est sec et chaud mais le vent de la montagne est frais. Les murs sont en terre et les fissures donnent un charme fou à ce village. C'est ici, dans la Quebrada, que j'ai pu rencontrer l'autre partie de la population argentine: les indiens. Ce sont des personnes chaleureuses qui m'ont parlé de leur vie avec passion. Ils m'ont donné une belle leçon d'humilité. Après m'avoir raconté leurs difficultés économiques et la discrimination dont ils étaient parfois l'objet, ils se tournaient vers la montagne et me disaient: "Mais on voit au moins ça en se réveillant le matin." Puis ils riaient en me prenant la main et me disaient que moi, de ma fenêtre, je voyais des édifices trop hauts et trop vides... d'âme. Ils m'ont proposé de m'héberger chez eux, mais ils me restaient les deux autres villages de la Quebrada à visiter et c'est donc avec regret que je les ai quitté après quelques heures d'échange.



Sur la route entre Salta et Humahuaca

La solitude à ce stade du voyage est presque ancrée en moi comme une évidence. Ca fait longtemps que je n'ai pas entendu ma voix. C'est étrange. Je parle différement en espagnol.
Tilcara est le village que j'ai le plus aimé dans cette magnifique montagne. Malgré le fait que de plus en plus de touristes arpentent ses ruelles, Tilcara reste fidèle à elle-même, à ses traditions, et ne surjoue pas. Elle n'exhibe pas ses pseudos spécialités (parfois) ou ses vraies spécialités comme un trophée. Elle vit comme elle a toujours vécu, avec ou sans étrangers. C'est ce qui m'a plu. C'est moi qui ai du, plus que jamais, m'adapter et comprendre comment être, tout simplement. Ce n'est pas comme dans d'autres villes, où le fait d'être étranger te permet d'accéder à un "traitement particulier" ou un accueil plus chaleureux ou personnalisé (comme: ah tu es français? Wouah, la Tour Eiffel...) Ici, tous se valent. Et cette égalité, même à l'échelle du village m'a enchanté.

Vue de Humahuaca

La randonnée dans le village précolombien m'a sidéré. Être au milieu d'un cimetière de cactus, entourée de ruines de maisonnettes de terre, donne une impression étrange. Celle d'être rien, en fait. Au sommet de cette colline du passé, où les esprits de ceux qui y ont vécu planent calmement, on regarde tout autour de soi, et rien n'apparaît mieux que notre ridicule échelle. La montagne majestueuse nous domine, sans être menaçante. J'avais l'impression d'entrer dans l'intimité d'un peuple qui pourtant a disparu depuis longtemps. Mais rien que d'imaginer la vie ici était émouvant. La deuxième randonnée avait pour but la "Gorge du Diable", un canyon situé à 8 km de Tilcara. L'ascension a été rude. Le souffle coupé et les articulations qui craquaient, je progressais mètre par mètre! Cela me permettait de faire des pauses régulièrement pour savourer l'instant inoubliable et le paysage qui s'offrait à moi. Plus je montais, plus les sommets enneigés étaient visibles, ce qui rendait la palette de couleurs de la Quebrada encore plus grande.

Monumento a la Independencia de Humahuaca

Arrivée au site, l'indien qui s'occupait de faire payer l'entrée m'a raconté l'histoire de son peuple et m'a prévenu que du fait des innondations récentes, la cascade la plus impressionnante n'était pas accessible. Malgré tout, ce que j'ai pu voir m'a enchanté. Je suis descendue jusqu'aux bords du Rio Huasamayo, au coeur du canyon. Le courant était très fort et je n'étais pas très rassurée. Les pierres roulaient dans l'eau, toutes plus colorées les unes que les autres. J'avais l'impression d'être une fourmi. Minuscule au milieu de cette nature impénétrable.

Mes potes de Tilcara

Ma dernière étape était Purmamarca. Ce village qui abrite le fameux Cerro de los Siete Colores. Majestueux. La randonnée que j'ai faite m'a passionné. Chaque montagne a une couleur différente et ce mélange donne une palette de peintre impressionnante. Je suis partie à 8h30 quand les premiers rayons du soleil donnent aux pierres une couleur encore plus éclatante. De plus, le fait d'être seule m'a permis de voir de nombreux oiseaux vacants à leurs occupations! Cette faune et cette flore si différentes de l'Europe m'ont dépaysé. J'étais dans un autre environnement, et ma manière de voir en a été bouleversé. Il y avait ce besoin permanent de contempler à 360°. Un pan de cette beauté ne suffit pas, il faut avoir un oeil sur tout. Être attentive à chaque bruit, à chaque souffle et à chaque silence.

En route pour la Gorge du Diable, Tilcara

Ce genre de voyage favorise l'introspection et j'en ai profité pour me poser de nombreuses questions. Je n'ai trouvé que rarement des réponses, mais je me suis sentie bien avec moi-même. En paix. Tranquille et presque confiante.

Randonnée à Purmamarca

Le retour à Buenos Aires n'en a été que plus difficile. Mais de revoir mes 3 amis français rencontrés à Salta m'a permis d'avoir encore un lien avec ce fabuleux voyage...

2 commentaires:

  1. Superbe récit, émouvant, sincère. Sûrement le plus beau et le plus vrai de tous. Il m'a donné des frissons....

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  2. Je l'ai lu en écoutant "adventures in solitude", et après avoir passé une journée de solitude sur la route entre Santiago et Puente del Inca en Argentine.
    Les photos sont magnifiques et le texte très beau.

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